8 juillet 2024

« Chaque semaine, notre histoire » Le 6 février 1934

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Le 6 février, plusieurs manifestations ont lieu simultanément. Les ligues d’extrême-droite, qui jouent un rôle très important dans l’entre-deux-guerres, notamment lorsque la gauche est au pouvoir, ce qui est le cas depuis les élections législatives de 1932, forment plusieurs cortèges.

Parmi les principales ligues présentes le 6 février, la plus ancienne est l’Action Française. Fondée en 1898/1899 par Maurice Pujo, Henri Vaugeois et Charles Maurras(60 000 membres revendiqués), elle a pour but de renverser « la gueuse » (la république) afin de restaurer la monarchie. Elle s’appuie sur les Camelots du roy, qui, malgré des effectifs assez limités, sont très actifs dans la rue. De fondation plus récente (1924), les Jeunesses patriotes, qui revendiquent l’héritage de la Ligue des patriotes, comptent 90 000 membres dont 1 500 font partie des « groupes mobiles ». Créées par Pierre Tatinger, député de Paris, elles entretiennent des rapports étroits avec des hommes politiques de droite, et comptent dans leurs rangs plusieurs conseillers municipaux de la capitale. On y trouve également la Solidarité française, fondée en 1933 par le richissime parfumeur antisémite François Coty.

Les ligues de droite et d’anciens combattants, de droite comme de gauche, appellent donc à manifester le jour même de l’investiture de Daladier, à Paris, place de la Concorde, en face de la Chambre des députés (le palais Bourbon). Au total 30 000 à 50 000 manifestants, dont une bonne majorité d’anciens combattants et quelques milliers d’émeutiers. Tous se mobilisent sur le thème : « À bas les voleurs ! ».Les ligueurs d’extrême-droite sont au premier rang de cette manifestation antiparlementaire. La journée débute par des réunions place de la Concorde, où toutes les ligues sont présentes.

Le colonel de la Rocque, toujours avec ses Croix-de-feu, gagne l’esplanade des invalides mais refuse le coup de force. À son appel, les Croix-de-feu se dispersent rapidement. Bien que proches du palais Bourbon, siège de la Chambre des députés, ils se refusent à occuper celui-ci. Leur dispersion rend alors vaine toute possibilité de renverser le régime par la force. Des milliers de militants, dont certains sont armés, tentent de marcher sur le palais Bourbon. L’émeute est extrêmement violente, à coups de boulets de charbon, de débris de fonte, de lames de rasoir fichées au bout d’un bâton, de billes d’acier qui font chanceler les chevaux de gardes mobiles désarçonnés, mais aussi de balles de revolver. Les forces de l’ordre sont harcelées puis, selon les conclusions rendues par la commission d’enquête parlementaire, subissent des tirs et ouvrent le feu à leur tour à au moins trois reprises au cours de la soirée. Les affrontements se prolongent pendant la nuit.

Parmi la population, manifestants ou badauds, on relève 14 morts et 657 blessés, mais deux d’entre eux décèdent plusieurs mois plus tard des suites de leurs blessures. Quatorze tués et soixante-deux blessés l’ont été par balle : des munitions de pistolet de 7,65 mm, mortelles jusqu’à 400 m.

L’Action française, qui compte en tout, vingt manifestants tués (dont cinq ont succombé à leurs blessures après le 7 février), déplore quatre morts parmi ses membres, seize blessés par balle parmi ses membres et dix parmi ses sympathisants. La ligue des Jeunesses patriotes pleure deux morts, de même que la Solidarité française, qui compte vingt-six blessés, dont deux par balle. L’Union nationale des anciens combattants a certifié lors de l’enquête n’avoir eu aucun mort dans ses rangs, mais cinquante-trois blessés par coups de matraque, coups de sabre et coups de crosse de revolver. Le président de cette association, fut lui-même blessé à la tête. Les Croix-de-feu, qui n’ont perdu aucun homme, ont subi deux blessures par balle après la dislocation du cortège et cent vingt blessés par coups de sabre, de matraque et de crosse de revolver (répartis sur les journées du 5 et du 6 février). Le Parti communiste signale deux blessés par balle parmi ses membres, un parmi ses sympathisants. Au moins quatre des vingts manifestants tués recensés par l’Action française n’appartenaient à aucune association politique.

Dans le service d’ordre, on dénombre un mort, et mille six cent-soixante quatre blessés. Neuf cent soixante-neuf d’entre eux sont des gardiens de la paix, six cent quatre-vingt-quinze sont des militaires : quatorze sapeurs pompiers de Paris et six cent quatre-vingts gendarmes (deux cents vingts-cinq gardes mobiles, deux cent soixante et onze gardes républicains et cent quatre vingt-cinq gendarmes départementaux). La presque totalité des blessures ont été occasionnées par des jets de projectiles (pierres, moellons, arceaux de fonte brisés, morceaux de vitres et de bitume).

Article par : Amblard de Guerry du Réveil des Moutons

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